Vendredi, tout est permis !

Aujourd’hui, c’est vendredi, et le vendredi … tout est permis ! Parfois le planning paraît soft le matin en arrivant … et puis la clinique finit en champ de bataille avec toute l’équipe sur les rotules à 20h ! 

Ce jour-là je n’ai pas de chirurgie, je suis en consultation toute la journée. Ma matinée est un enchaînement de consultations vaccinales et de retraits de points. Pas trop de pression. Les journées de consultations se suivent mais ne se ressemblent pas. Personnellement j’adore cette variation et cette diversité dans mon travail. Je sais que pour d’autres personnes ce peut être une source de stress. 

Au départ je n’aimais pas ces consultations vaccinales. Honnêtement je trouvais que c’était une perte de temps, je n’apprenais rien, ce n’était pas stimulant et je me forçais à parler de la pluie et du beau temps. Clairement j’y allais en traînant des pieds… moi ce que je voulais faire c’était de la médecine, réfléchir sur des cas complexes, faire des examens complémentaires, expliquer des diagnostics de dingue aux propriétaires !

Et puis … c’est en restant finalement dans la même clinique un certain temps que j’ai appris à apprécier ces moments. 

D’une part pour le côté humain : c’est lors de ces visites de routines régulières que se crée le lien (ou pas d’ailleurs !) entre le vétérinaire et l’animal, entre le vétérinaire et le propriétaire. En revoyant régulièrement ces duos, une véritable relation se crée, c’est un peu comme devenir le médecin de famille en quelque sorte. A force, on en connait un peu plus que juste la santé du chien ou du chat. Bon alors clairement ce n’est pas à chaque fois le coup de foudre ! Il y a des gens avec qui le feeling passe immédiatement et d’autres où la connexion ne se fait pas, c’est comme ça ! 

D’autre part pour le côté médical : et oui au final lorsque l’on suit un animal depuis son plus jeune âge on se rend vite compte de l’importance primordiale de ces consultations de routine. C’est à ce moment-là que vous pouvez détecter un changement clinique qui passe encore inaperçu aux yeux du propriétaire. Ces examens sont primordiaux pour mettre en évidence le plus précocement possible certaines affections. C’est pour cette raison que l’examen clinique de consultation vaccinale doit être très rigoureux et pas de simples gestes réflexes en papotant avec le propriétaire avant de faire la petite piqûre et de rentrer chez soi. Enfin, c’est comme ça que je vois les choses maintenant ! 

Bref, ce jour-là, j’enchaîne les vaccinations. Je vois notamment un jeune chiot de 4 mois pour son dernier rappel de primo-vaccination. Le chiot a été adopté au sein d’un élevage, il y a environ 3 semaines. Tout se passe bien dans sa nouvelle famille et il est en pleine forme. Comme c’est la première fois que nous le voyons nous abordons de nombreux sujets : l’éducation, l’alimentation, les anti-parasitaires, la stérilisation … Je réalise un examen clinique qui est tout à fait normal. Finalement, je prends connaissance du protocole vaccinal initié sur ce chiot. A ma grande surprise, je vois que le chiot a reçu les injections CHP mais aucune injection contre la leptospirose. En discutant avec le propriétaire, il m’explique que l’éleveur a formellement déconseillé cette vaccination. Je découvre alors un document, très détaillé, expliquant le danger de cette vaccination, via un certain nombre d’arguments… Telle une funambule au-dessus du vide, je m’aventure à lui demander ce qu’il en pense lui-même, ce qu’il envisage de faire pour son chien, et accessoirement s’il souhaite mon avis sur le sujet. Ce à quoi il me répond “non”. 

[ Mode pause : On ]

Bon, on se trouve donc ici clairement dans un contexte de méfiance du propriétaire vis-à-vis du vétérinaire. Je me sens dans un premier temps toujours gênée dans ce type de rapport : j’ai l’impression que tout ce que je vais dire va être retenu contre moi, entendu comme “elle veut m’imposer ses idées, me vendre son produit” (alors que moi clairement je suis salariée, je ne gagne rien à vacciner ou non). J’ai aussi beaucoup de mal à comprendre, je l’avoue, pourquoi dans ce type de cas, le propriétaire accorde beaucoup plus de crédit et plus de confiance à l’éleveur. Je pense, naïvement peut être, que chacun connaît bien son métier mais s’imposer expert dans celui des autres est un peu hasardeux. Cette situation peut être extrêmement déroutante pour un jeune vétérinaire… Ce que je garde en tête dans ce type d’échange c’est que nous sommes avant tout des conseillers. Il n’est pas de mon ressort d’imposer telle ou telle chose. Mon rôle est d’informer, de transmettre mes connaissances. Les propriétaires prennent ensuite leur décision avec toutes les cartes en main.

[ Mode pause : Off ]

Alors je leur donne quelques chiffres issus d’études mais aussi de ma pratique. Mon but n’est pas de leur faire peur mais ce que je vois, moi, c’est le nombre de cas de leptospirose que nous avons eu cette année à la clinique… et le seul qui s’en est sorti. Je reste aussi totalement transparente sur le rôle de la vaccination et les multiples sérovars de leptospires rendant la protection parfaite inexistante. [ Spoiler alert : le chien est finalement revenu, quelques semaines plus tard, pour sa vaccination leptospirose ]

J’ai pris un petit peu de retard sur mon planning. Mes consultations s’enchaînent et je revois une petite chienne d’un an en consultation de suivi. Elle est actuellement sous traitement pour une gastrite chronique. C’est l’occasion de faire le point sur son état, son appétit, ses troubles digestifs et finalement ses traitements. 

Je reçois ensuite un labrador en suivi également, pour sa dermatite atopique. J’adore les suivis de dermatite atopique… quand tout se passe bien !!! Bon là ce n’est pas vraiment le cas… C’est toujours extrêmement frustrant pour le propriétaire, et pour nous aussi, de voir ces animaux en rechute. La stabilisation peut parfois être très complexe, et les rechutes au moindre changement sont fréquentes. La première consultation est primordiale à mon sens afin d’expliquer l’ensemble de la pathologie, la prise en charge des crises, la prise en charge chronique, les soins etc… Telle une grande oratrice il faut réussir à capter le propriétaire et l’impliquer dans la prise en charge 😉 

Au beau milieu de tout ça, on reçoit un appel pour un chat rouge (traduction :  un chat pas très gentil DU TOUT) qui n’a pas uriné depuis 72h… vous aussi vous la sentez arriver la petite urgence ?! 

30 minutes plus tard, je reçois ce chat. Il doit être tranquillisé pour le moindre examen (pas gentil du tout je vous ai dit…). Très rapidement et sans grande surprise compte tenu des commémoratifs, je mets en évidence un globe vésical. Le chat est sondé et mis sous perfusion. Un bouchon se trouvait à l’extrémité distale de l’urètre. Ses analyses biochimiques mettent en évidence une insuffisance rénale aiguë et une hyperkaliémie majeure. L’hyperkaliémie est prise en charge le plus rapidement possible. Pendant ce temps, les consultations suivantes arrivent et le retard s’accumule. Je souffle un bon coup. Une fois les actes essentiels effectués, je fais une petite liste précise des soins à effectuer sur ce chat aux assistantes. Elles prennent le relais et la surveillance rapprochée. 

Je retourne en consultation. C’est un suivi de maladie rénale chronique. Une petite mamie chat, qui arrive sur le dernier stade de sa maladie… Ce sont des consultations prenantes : il faut gérer son discours, trouver les bons mots pour expliquer la suite, gérer sa propre émotion et celle du propriétaire. Cette petite mamie chat, comme beaucoup de chats, est une guerrière. Elle ne mange plus beaucoup mais garde pour l’instant une certaine vitalité. Nous discutons assez longuement sur ce qui peut se passer maintenant, ce que je peux leur proposer, et de ce qu’il préfère pour sa minette. Il ne veut surtout pas qu’elle souffre. Nous mettons en place des soins de confort. Lorsqu’on se dit au revoir, nous savons tous les deux que nous allons nous revoir dans peu de temps…

Et puis les consultations s’enchaînent avec de nouveaux vaccins, une boiterie de chien, une plaie de chat.

En fin d’après-midi, la kaliémie du chat rouge est revenue dans l’intervalle de référence. 

C’est un vendredi soir, je passe la main à mes collègues pour la suite. Pour moi c’est un week-end off. J’essaye de décrocher un maximum mais je ne vous cache pas que je prendrai quand même des nouvelles de ce chat rouge pendant le week-end … 😉 

Pauline

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